Industrie 4.0 et Industrie 5.0 : les fondements
Prochaine phase majeure dans le secteur manufacturier, l’Industrie 5.0 se caractérise par une collaboration entre travailleurs et machines intelligentes dans le but d’atteindre une production optimisée. Pour cela, elle s’appuie sur les technologies avancées de l'Industrie 4.0, telles que l'intelligence artificielle (IA), l'Internet des objets (IoT), la robotique, et les mégadonnées, tout en remettant le facteur humain au centre du processus de fabrication.
L’Industrie 5.0 englobe la connectivité, la personnalisation de masse, la durabilité, l'efficience et le bien-être des employés. Elle crée ainsi un équilibre entre productivité et responsabilité sociale et environnementale. Le but ? Un avenir où technologie et humanité progressent ensemble, pour une industrie plus éthique et écologique.
L’Industrie 5.0 reconnaît le pouvoir de l'industrie à atteindre des objectifs sociétaux au-delà de l'emploi et de la croissance pour devenir un fournisseur résilient de prospérité, en faisant en sorte que la production respecte les limites de notre planète et en plaçant le bien-être du travailleur de l’industrie au centre du processus de production.
Pourquoi l'ère du 5.0 requiert-elle de nouvelles compétences de gestion ?
Qui dit arrivée de l'Industrie 5.0, dit transformation profonde du paysage industriel. Cette métamorphose impose une réévaluation des compétences managériales traditionnelles, car elle exige non seulement une maîtrise des innovations technologiques, mais aussi une approche humaine et responsable du leadership. Les managers doivent apprendre à évoluer dans un cadre où la flexibilité, l'adaptabilité, la capacité à inspirer et à innover sont cruciales.
En augmentant la confiance, le sentiment de bien-être et la résilience au stress des individus, le leadership centré sur l’humain a le potentiel d’aider les individus à s’adapter plus facilement. »
Les compétences managériales clés pour l’Industrie 5.0
Technologies et digitalisation
Compréhension et maîtrise des technologies émergentes
Une bonne connaissance des technologies de pointe comme l'intelligence artificielle (IA), la robotique et l'Internet des Objets (IoT) est impérative.
Les managers doivent comprendre comment elles peuvent être intégrées dans les processus pour améliorer la productivité, la qualité des produits et l'expérience client.
L'IA et le big data constituent la troisième priorité dans les stratégies de formation des entreprises d'ici à 2027, et la première priorité pour les entreprises de plus de 50 000 salariés.
Future of Jobs Report, Forum économique mondial
Analyse de données et prise de décision appuyée sur les données
Être capable de collecter, d’analyser et d’interpréter de grandes quantités de données pour prendre des décisions éclairées est plus pertinent que jamais.
Les managers doivent être en mesure d’utiliser les outils adéquats pour déceler les tendances, optimiser les opérations et anticiper les besoins du marché.
Cybersécurité et protection des données
Face à l'accroissement de la digitalisation et les innombrables données, la sécurité des informations fait partie des priorités majeures.
Les gestionnaires 5.0 doivent en être conscients, connaître et appliquer les meilleures pratiques de protection des données au sein de leur organisation.
Leadership humain et intelligence émotionnelle
Les employeurs estiment que 44 % des compétences des travailleurs seront perturbées au cours des cinq prochaines années. Les compétences cognitives sont celles dont l'importance croît le plus rapidement.
Future of Jobs Report, Forum économique mondial
Pensée analytique et pensée créative
La plus grande priorité pour la formation des compétences entre 2023 et 2027 est la pensée analytique, qui devrait représenter 10 % des initiatives de formation, en moyenne. La deuxième priorité pour le développement de la main-d'œuvre est de promouvoir la pensée créative, qui fera l'objet de 8 % des initiatives de perfectionnement.
Future of Jobs Report, Forum économique mondial
Ces deux formes de pensée, bien que distinctes, sont complémentaires et essentielles à l’ère du 5.0. La première assure une fondation solide pour comprendre les problèmes et évaluer les options de manière objective, tandis que la deuxième ouvre la porte à l'innovation et à l'exploration de nouvelles possibilités. Ensemble, elles permettent aux managers de concevoir et de mettre en œuvre des solutions innovantes et réalisables.
Empathie et communication
Faire preuve d’empathie et communiquer efficacement est crucial pour créer un environnement de travail foisonnant et motivant.
Les managers doivent être capables de comprendre les perspectives ainsi que les besoins de chaque membre de leur équipe, en encourageant une culture de feedback ouvert et constructif. Cela inclut l'écoute active, l’intelligence émotionnelle, la capacité à reconnaître et à valoriser les contributions individuelles.
Dans le cadre d'une enquête mondiale menée l'année dernière, le Boston Consulting Group (BCG) a demandé à 6000 personnes quelles sont les qualités qu'elles attendent le plus de leurs dirigeants au travail. Les quatre principales qualités sont toutes liées à ce que le BCG appelle les actions du « cœur » (bien-être émotionnel). Les personnes interrogées ont déclaré qu'elles souhaitaient surtout plus de reconnaissance, d'encadrement, d'écoute et de bienveillance de la part de leurs dirigeants.
Debbie Lovich, directrice générale et associée principale, BCG dans Time
Gestion de la diversité et de l’inclusion
L’aspect humain du 5.0 se caractérise aussi par une diversité accrue, avec des équipes riches de compétences variées et d’origines culturelles différentes, le tout associé aux capacités des machines intelligentes.
Cela nécessite des managers qui promeuvent l’inclusion et un cadre de travail dans lequel chaque individu se sent pris en compte.
Développement d'une culture d'entreprise résiliente et adaptable
Le leader 5.0 embrasse le changement et crée une culture d'entreprise qui encourage l'innovation et soutient la résilience. Les managers doivent être des modèles de flexibilité, montrer comment s'adapter rapidement aux nouvelles technologies et aux évolutions du marché. Ils doivent également encourager l'apprentissage continu et la persévérance.
Le troisième élément majeur d’une organisation irrésistible est la nécessité de créer un lieu de travail flexible, humain et inclusif.
Gestion de la durabilité
Capacité à effectuer des choix pour une production durable
La production durable implique l'adoption de pratiques qui réduisent l'impact environnemental des activités industrielles, tout en maintenant la rentabilité. Les managers doivent être à l'avant-garde de la mise en œuvre de technologies propres, de l'optimisation de l'utilisation des ressources, et du développement de produits non polluants.
Il est question d’intégrer le recyclage, la réutilisation et la réduction des déchets dans les processus de production, mais aussi de sensibiliser les équipes à l'importance de la durabilité et d'intégrer des objectifs écologiques dans les plans stratégiques de l'entreprise.
Équilibre entre efficacité opérationnelle et impact environnemental
L'un des défis majeurs pour les managers est de trouver le juste équilibre entre l'amélioration de l'efficacité opérationnelle et la réduction de l'impact environnemental.
Pour ce faire, ils doivent utiliser des indicateurs de performance industrielle pertinents et adopter des technologies ainsi que des méthodes de travail qui améliorent à la fois la productivité et la durabilité.
Changement et gestion de crise
Gestion du changement organisationnel
Les managers doivent être capables de communiquer efficacement les raisons du changement, minimiser la résistance des travailleurs, et encourager la mobilisation.
Cela comprend la mise en place de plans de transition clairs et la formation continue des employés pour développer les compétences nécessaires.
Gestion de crise
La gestion de crise implique d'identifier les risques potentiels, de préparer des plans d'intervention, et de réagir efficacement lorsqu’un problème survient.
Les compétences clés incluent ici la capacité à évaluer rapidement la situation, à prendre des décisions sous pression, et à communiquer de manière transparente avec toutes les parties prenantes.
Les managers doivent également construire des équipes endurantes, capables de s'adapter et de rebondir après des perturbations, assurant ainsi la continuité des activités.
Comment développer les compétences managériales pour un leadership 5.0
1. La formation continue et l’apprentissage adaptatif
Ces deux approches axées sur la flexibilité permettent aux managers de rester à la pointe des dernières tendances, technologies et méthodes de gestion. Voici quelques exemples :
- programmes de formation spécialisée ;
- apprentissage en ligne et auto-formation ;
- workshops et séminaires.
En s'engageant dans un processus d'apprentissage continu, les leaders peuvent mieux comprendre et exploiter les possibilités offertes par les nouvelles technologies, tout en cultivant une sensibilité accrue aux enjeux de durabilité et aux besoins humains au sein de l'entreprise.
L'apprentissage adaptatif, personnalisé selon les besoins spécifiques de chacun, renforce la capacité à travailler dans un environnement en constante évolution, à résoudre des problèmes complexes et à prendre des décisions stratégiques.
Pour que les dirigeants changent radicalement leur approche de gestion de la performance, ils doivent donner aux managers les ressources et la formation dont ils ont besoin pour répondre aux nouvelles exigences de développement des employés et d'amélioration des performances.
Gallup, It’s the Manager
2. Le coaching, le mentorat et le leadership participatif
Ces approches favorisent un contexte où le partage de connaissances, l'expérience pratique et l'engagement collectif sont des moteurs de l'évolution professionnelle.
Le coaching offre une guidance et un soutien personnalisés, aidant les managers à affiner leurs compétences, à surmonter les défis spécifiques et à atteindre leurs objectifs de leadership.
En reliant les managers à des leaders expérimentés, le mentorat facilite le transfert de savoir-faire en donnant la possibilité aux seconds de partager leurs connaissances et expériences avec les nouveaux venus.
Parallèlement, le leadership participatif encourage l'inclusion et la collaboration, permettant aux équipes de contribuer activement à la prise de décision et à l'innovation. Cette gestion démocratique renforce la cohésion de l'équipe, stimule la créativité, et prépare le terrain pour une gestion plus agile et réactive.
3. L’apprentissage externe
Cette approche favorise l'assimilation de nouvelles idées et stratégies qui peuvent être adaptées et appliquées par les managers au sein de leur propre contexte organisationnel, enrichissant ainsi leur arsenal de compétences managériales. Par exemple, l’apprentissage externe peut se faire grâce à des :
- partenariats et réseaux professionnels ;
- conférences et événements du secteur ;
- benchmarking et études de cas.
En cultivant des liens au-delà de leur propre secteur et de leur entreprise, l’apprentissage externe ouvre la porte aux managers sur un vaste échange de connaissances et d'expériences. Il permet non seulement de rester à l'avant-garde des développements technologiques et managériaux, mais aussi de développer un certain esprit d'innovation.
L’exemple de la nouvelle usine intelligente Deloitte Canada
À Montréal en janvier 2023, Deloitte Canada a inauguré son « usine intelligente », la toute première du genre. Celle-ci intègre en effet un écosystème interconnecté de plus de 20 solutions et technologies de pointe. Elle a pour objectif de métamorphoser la fabrication et l’entreposage grâce à la transformation numérique.
L'ouverture de cette nouvelle usine est un très bon exemple des principes de l'Industrie 5.0 en action. Pendant que les tâches difficiles sont exécutées par des machines, les employés peuvent développer leurs compétences, notamment managériales. Ainsi, en combinant avancées technologiques, durabilité et collaboration étroite entre humains et machines, cette installation montre comment les entreprises peuvent adopter des technologies de pointe pour améliorer l'efficacité et la personnalisation, tout en mettant l'accent sur le bien-être des employés et la réduction de l'impact écologique.
L’usine intelligente @ Montréal prévoit de travailler avec des universités locales pour préparer la prochaine génération de main-d’œuvre et faire essayer de nouvelles innovations à des étudiants et à des chercheurs. Ces occasions d’apprentissage permettront de combler le manque croissant de talents dans le secteur des technologies.
Transformer les défis de l’Industrie 5.0 en opportunités de développement
Le troisième facteur d’un management « irrésistible » est le développement du leadership : les organisations avec des niveaux élevés d’engagement des employés se concentrent sur le développement de grands leaders. Ils investissent massivement dans le développement du management et veillent à ce que les nouveaux dirigeants reçoivent un soutien suffisant.
Alors que l'ère de l'Industrie 5.0 redessine les contours de l’industrie mondiale, elle souligne l'urgence pour les gestionnaires de revoir, d’adapter leurs compétences managériales. Ce nouvel horizon exige de trouver le juste équilibre entre compétences techniques et humaines, de comprendre et d’intégrer dans chaque action la durabilité et l'innovation, tout en sachant gérer crises et changements. Les managers doivent être prêts à remettre en question le statu quo, à expérimenter de nouvelles approches, à s’adapter et à apprendre de manière continue pour guider efficacement leurs équipes.
En somme, à l’heure du 5.0, la différence entre leaders et suiveurs se fera par la capacité à allier la vision technologique à une approche humaine et durable, prouvant que le futur appartient à ceux qui osent innover tout en restant ancrés dans des valeurs profondément humaines et écologiques.