S’immerger dans la réalité du client
Arrivée tôt ce matin-là, Angélique nous accueille alors qu’elle répond à quelques courriels avant de débuter sa journée. « J’essaye toujours d’arriver pour le kick-off du matin. C’est quelque chose qu’on a mis en place avec les gestionnaires, une sorte de lancement de la journée de 10 à 15 minutes avec les employés. »
Rapidement, nous nous dirigeons vers le point de ralliement pour la première rencontre de la journée. Une grande fierté illumine les yeux d’Angélique dès qu’on lui parle du projet Moderco: « J’ai développé le projet de A à Z avec eux, donc on passe beaucoup de temps ensemble et j’adore travailler avec eux. »
C’est Denis, Coordonnateur de production, qui mène la rencontre de début de quart (kick-off) avec son équipe. Angélique reste en retrait et l’observe en prenant des notes, afin de pouvoir lui donner du feedback après la rencontre.
Comme on le verra tout au long de la journée, l’observation au point d’exécution, pierre angulaire du Gemba Walk, est l’un des éléments clés du coaching terrain. Ici, elle permet à Angélique d’observer Denis dans son environnement de travail, de constater en temps réel ses interactions avec ses employés.
Plus tard, Angélique renchérira sur ce qui différencie le coaching terrain du coaching exécutif, plus largement connu:
Le coaching exécutif travaille principalement sur la posture et l’état d’esprit. Il est plus orienté sur la prise de décision, la vision globale, les objectifs. De son côté, le coaching de terrain exige beaucoup plus de liens avec les points de contrôle techniques, opérationnels et doit s’adapter à chaque ligne. Il se concentre aussi davantage sur l’accompagnement du manager de proximité, afin qu’il puisse adopter des comportements proactifs dans le pilotage de la performance, qu’il soit capable de résoudre les écarts et qu’il devienne à son tour un coach, une ressource pour ses employés.
Une fois le kick-off terminé et les priorités des employés établies, la journée de production est lancée. Angélique peut débuter une première tournée de supervision active avec Vicky, Superviseure de production. Toutes les deux ont au préalable fait leurs devoirs.
« Les coachs comme les coachés doivent se mettre en condition pour la journée, mais pas de la même façon. Les coachs et les Proacteurs* consultent UTrakk afin de regarder les points de vigilance ainsi que les forces, pour se préparer au coaching. Avant de débuter la tournée, ces points sont rappelés au superviseur pour s’assurer des éléments à travailler. Il faut également valider quels sont les enjeux et les priorités du moment, afin de pouvoir s’adapter à la réalité du terrain. La préparation tout comme le briefing avant la tournée sont très importants, car ils permettent de partir sur de bonnes bases plutôt que d’avancer au hasard. » - Angélique
*Les Proacteurs sont des employés à l’interne formés par Proaction International pour prendre le relais une fois le mandat terminé dans le but de pérenniser les acquis et les bonnes pratiques.
Vicky et Angélique entrent dans l’usine et commencent leur tournée. Sur le terrain, la coach observe d'un point de vue technique et relationnel les interactions entre le manager et les membres de son équipe. Entre chaque poste de travail, la coach voit avec la personne coachée s’il y a des points à améliorer.
Cette façon de faire, désignée sous le terme de « shadowing » en anglais, peut sembler plutôt invasive et demande un temps d’adaptation.
Certains n’aiment pas être suivis et vont le dire de manière très directe, explique Angélique. Mais dès qu’ils ont le déclic, qu’ils comprennent la valeur ajoutée du coaching, ça ne les dérange plus vraiment. Il y en a même qui aiment ça et qui demandent d’être accompagnés durant les tournées, car ils voient, justement, ce que ça leur apporte. D’où l’importance de donner du feedback positif pour encourager les joueurs et les inciter à s’améliorer.
« Autre point important: on travaille avec des humains. Il arrive que le moment ne soit pas le bon ou qu’il y ait des enjeux spécifiques à l’instant T. Il est donc impératif de faire preuve de discernement et d’ouverture en tant que coach. Si ce n’est vraiment pas une bonne journée pour la ou les personnes, il faut pouvoir être flexible et remettre la session à plus tard. C’est quelque chose que les coachés apprécient. Le coaching doit être un support et non leur ajouter du poids. »
Après la tournée, le coach effectue un retour pour valoriser les points forts du manager et mettre en lumière les axes de progression. Suite à cet entretien, le gestionnaire doit avoir compris de manière claire ce qu’il a bien fait et ce qui peut être amélioré.
Vicky, qui travaille chez Moderco depuis 5 ans et qui a nouvellement été promue à un poste de gestionnaire, aime avoir ce regard extérieur:
Je n’avais jamais été coachée auparavant. Cette démarche m’a permis de moins courir sur le plancher pour éteindre les feux. Je suis plus organisée, plus structurée dans mon travail. Je trouve aussi ça rassurant d’être accompagnée par une personne extérieure. Ça apporte une autre vision, un autre point de vue. On ne se voit pas quand on est en plein travail, dans le feu de l’action. Le coach permet donc d’observer ce qui va, mais aussi ce qui ne va pas. »
Alors que nous laissons Vicky continuer son travail dans l’usine, nous nous dirigeons avec Angélique vers le bureau de Denis, vu plus tôt à la rencontre matinale. Employé chez Moderco depuis 20 ans, il est aujourd’hui Coordonnateur de production. C’est lui qui est en charge de la planification de la production, un poste clé dans toute entreprise manufacturière.
C’est maintenant le moment de la revue de supervision active (RSA) avec Denis. C’est un peu une tournée, mais à un plus haut niveau, durant laquelle le coach vérifie avec son équipe de superviseurs qui ont fait des tournées en amont, quels sont les enjeux du matin. L’escalade de ces enjeux, des avancements et des statuts est cruciale.
Puis vient la revue de production, durant laquelle le Directeur des opérations, appuyé par le Coordonnateur, remonte les enjeux de production aux équipes de soutien (maintenance, approvisionnement, réception, qualité, etc.), ainsi que le statut des secteurs. Il est alors possible de constater cette fameuse escalade des enjeux et des actions, qui part du plancher et qui remonte à toutes les fonctions de l’usine.
Plus tard dans la journée, Angélique effectue une nouvelle tournée et coache le Proacteur. S’en suivent plusieurs autres RSA et tournées. Si le temps le permet, la conseillère travaille aussi en collaboration sur la planification. Elle crée des groupes d’intervention pour peaufiner les cadences, par exemple, afin d’améliorer le contenu des tournées.
L’art de pratiquer pour se perfectionner
En général, une démarche complète de coaching terrain s’étend sur une période de 6 mois. Cela donne suffisamment de temps pour un travail en profondeur et pour permettre aux acquis de devenir des réflexes. Cela laisse également le temps aux managers de constater des améliorations significatives dans leur travail quotidien. Ils doivent non seulement s’adapter, mais aussi vivre ce que l’on nomme « la courbe émotionnelle ».
« Au début, les coachés sont souvent ouverts et enthousiastes à l’idée d’implanter une nouvelle démarche. Mais quand ils se rendent compte que ça les implique aussi, que ce sont eux qu’on va coacher et qu’ils ont des changements à faire, la motivation redescend. Ils peuvent être découragés. Il faut donc une période d’ajustement pour que les coachés vivent les différentes phases de la courbe avant de s’adapter, d’accepter la démarche et de changer leurs comportements », nous dit Angélique.
Mesurer la progression avec les KBI
Les indicateurs clés comportementaux, ou KBI (key behavioral indicators, en anglais), ne se limitent pas uniquement à l'évaluation des résultats d'un plan de coaching. En réalité, ils jouent un rôle essentiel dans la trajectoire du projet, en permettant de suivre de près l'évolution des habiletés de gestion au fil du temps. Ils permettent d’observer l’évolution du comportement, des compétences et des pratiques managériales des joueurs impliqués. En donnant une vue précise sur les points forts et les points à améliorer, ils aident à ajuster les stratégies en conséquence.
Le système de gestion quotidienne UTrakk permet d’aller encore plus loin en accompagnant les managers durant et entre les activités clés de gestion (tournées de terrain, réunions régulières, etc.), tout en offrant des fonctionnalités de coaching et de suivi des indicateurs clés comportementaux.
Soutenir l'évolution des managers: le rôle central du coaching terrain
Le coaching terrain est un élément clé de la réussite dans l'industrie manufacturière. Comme dans le domaine du sport, le coach est là pour observer, conseiller, guider le manager dans chaque moment de sa journée de travail. Il fournit un accompagnement personnalisé qui aide les gestionnaires à développer leurs compétences opérationnelles et managériales.
Les avantages du coaching de terrain s’appliquent non seulement aux managers et à leurs équipes sur le plan professionnel et personnel, mais influencent aussi l’ensemble de l’organisation (production, opérations, etc.), un peu à la manière d’un effet domino. Tout le monde en bénéficie.
On fait croître des humains, c’est indéniable. J’entends beaucoup les gestionnaires en parler et je vois les résultats. L’avantage, c’est que les personnes coachées peuvent prendre conscience de leur évolution, de leurs progrès; ça les transforme. Ce n’est pas juste le processus qu’on change, ce sont aussi les travailleurs.